Jean-Louis de Saint-Prix, soutien indéfectible des listes de droite à Montélimar depuis des décennies, ne comprend pas pourquoi Franck Reynier se maintient et prend le risque de faire gagner la gauche. Il appelle à voter Julien Cornillet. Ambiance de fin de règne dans les rangs du sortant.
Qu'elle semble loin l'époque où Franck Reynier était élu dès le premier tour de l'élection municipale, avec 52% des voix ! L'élu accumule depuis les déboires : les projets qu'il défend depuis des années - la gare TGV d'Allan, le centre commercial au Nord - ont pris l'eau en laissant à la ville et à l'Agglo une belle ardoise. Son centre ville, classé comme l'un des plus dégradé de France, a attiré tous les médias nationaux à Montélimar, devenu l'exemple à ne pas suivre. Il s'est fâché avec une partie de son électorat "naturel" : les commerçants, en entrant en guerre avec l'association 600 Commerces, les seniors, en tentant de démolir, sans succès, l'Office Municipal de la Retraite Active, dirigée par l'épouse de son ancien mentor, Thierry Cornillet. Il a été battu sèchement à l'élection législative.
L'affaire de la piscine, révélée par le Canard Enchaîné et Montélimar News, et pour laquelle le procureur de la République vient de révéler l'existence d'une enquête, toujours en cours, dans le cadre d'une information judiciaire.
Enfin, il est arrivé troisième au premier tour de l'élection municipale de mars avec 24,2% des voix, loin derrière Julien Cornillet (34,2%) et même derrière la candidate de gauche Catherine Coutard (25,6%); une contre performance d'autant plus remarquable que la crise sanitaire à donné partout une belle prime au maire sortant.
Franck Reynier n'a pas su tirer profit de la crise sanitaire
La crise du Covid-19 lui a procuré un sursis et une occasion en or de se refaire une petite santé. Mais il n'a pas su en profiter. Il a réagit avec retard, les premières mesures proposées n'étaient pas à la hauteur de l'enjeu. Il aurait pu passer pour un rassembleur - ce dont les Montiliens avaient besoin dans cette situation de crise - en prenant l'initiative de solliciter ses oppositions. Il ne l'a pas fait. Puis il a refusé de saisir les mains tendues de Catherine Coutard et des autres composantes de l'opposition de gauche, proposition de concertation et d'échanges à laquelle même Alain Ciskel, élu de la droite nationale, était prêt à participer. A tout instant il a paru politicien, préoccupé par l'unique désir de tirer la couverture à lui et d'être le seul bénéficiaire de la situation. Son projet de conseil municipal d'urgence, en version télévisuelle, a lamentablement capoté. De même que celui de sortir un Montélimag spécial, dans lequel il n'envisageait que de se mettre en scène.
L'épisode de l'achat des masques, avec leur étiquette en chinois, chers et de qualité médiocre, qu'il a tenté de faire prendre pour du made in France, n'a pas été non plus très glorieux.
Résultat : le maire sortant apparaît encore plus has been qu'il y a trois mois. Le journal La Tribune a beau vanter les vertus de l'expérience, cherchant à affaiblir ainsi le jeune Julien Cornillet, l'image de Franck Reynier est durablement abimée et cela n'est pas sans conséquence sur ses colistiers. La constitution de sa liste de second tour bruisse depuis des semaines déjà de la résistance de certains, qui se demandent pourquoi Franck Reynier persiste à maintenir sa candidature alors que l'échec semble inévitable.
L'un d'eux vient même de franchir le Rubicond. Jean-Louis de Saint-Prix, 39eme sur la liste de Franck Reynier au premier tour, a fait savoir au Dauphiné Libéré et à la Tribune qu'il se désolidarisait du maire sortant et appelait même à voter pour Julien Cornillet. Une situation totalement inédite. En effet, la loi électorale interdit à Jean-Louis de Saint-Prix de quitter la liste de Franck Reynier. C'est l'une des nombreuses bizarrerie qu'aura provoqué le coronavirus : un membre d'une liste fera campagne pour une autre liste !
Jean-Louis de Saint-Prix
Nous avons déjà pu lire ici ou là des accusations d'opportunisme visant Jean-Louis de Saint-Prix. Accusations bien stupides. Depuis de nombreuses années, ce cadre commercial de 63 ans se contente d'apporter sa notoriété et son nom prestigieux - c'est l'arrière petit fils d'Emile Loubet - a des listes de droite. Il ne brigue aucun mandat. Il était toujours en fin de liste. S'il est finalement entré au conseil municipal, il y a peu de temps, c'est après de nombreuses défections et un décès dans les rangs de la majorité.
Jean-Louis de Saint-Prix a expliqué clairement au Dauphiné le pourquoi de sa défection : Franck Reynier, de 2014 à 2020, est passé de 52% à 24%. C'est clairement pour lui un désaveu qui devait aboutir à ce que le maire sortant accepte de se retirer au profit du candidat de droite arrivé en tête, Julien Cornillet. En ne le faisant pas, estime-t-il, il donne une chance à la liste de Catherine Coutard de remporter l'élection.
Selon nos confrères, qui ont pu joindre Franck Reynier, le maire sortant ne considère la défection de son colistier que comme une péripétie. "Même pas mal" semble-t-il avoir pour seule réponse. Pas sur que la méthode Coué soit très efficace, en l'occurrence.
PL
La photo de Jean-Louis de Saint-Prix est tirée du site officiel de la ville de Montélimar